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S comme Souvenir

 

            Le plus émouvant souvenir de Louise est écrit le dimanche 20 mai 1928 et libellé ainsi :

 

            Le dimanche 20 mai 1883, elle quittait sa place de « demoiselle de magasin ».

            Le 23 mai 1883, elle avait 20 ans.

            Le 24 mai 1883, elle épousait Charles Dumonceaux.

 

Mais pourquoi attache-t-elle autant d’importance à son départ?

Il est nécessaire de revenir sur l’enfance de Louise.

Sa naissance est particulière à plusieurs titres

            Sa mère, Marie Matre est âgée de 19 ans, couturière et habite rue Mouffetard, sans doute seule. Louise n’a pas de père déclaré.

L’accouchement n’a pas lieu au domicile de la mère mais chez une sage-femme. Et certaines sages-femmes avaient  le droit de recevoir des femmes enceintes en pension. Ensuite l’enfant pouvait soit être abandonné par la mère soit mis en nourrice.

La mémoire familiale dit que Louise avait été mise en pension chez des bonnes sœurs.

En tout cas, Louise en avait voulu à sa mère toute sa vie.

            En 1865, Marie Matre se marie avec Émile Martin, le père de Louise qui est alors reconnue et change de nom patronymique. Le couple a une 2e fille, Valentine née en 1866.

 

            Voici la page écrite par Yvonne Gressin (petite-fille de Maman Lise) en 1990.        Elle éclaire les zones d’ombre de la petite enfance de Louise : elle était en  nourrice chez ses grands-parents à Bussy Saint Georges.

            Yvonne écrit aussi que Louise et sa sœur ont ensuite passé leur enfance et leur jeunesse chez des religieuses. Cela m’étonne car j’ai retrouvé des livres de prix des 2 filles (en 1873 et 1875), venant d’une institution  privée, située rue du Couédic à Paris.

Une autre hypothèse : elles vivaient chez des religieuses et allaient à l’école ailleurs.

Sur le recensement de 1866 à Bussy St Georges, Louise est déclarée « Petite-fille en nourrice » chez ses grands-parents maternels.

Pour mémoire, sa sœur Valentine nait le 14 juin 1866 à Paris au domicile de ses parents dans le 14e arrondissement.

En janvier 1871,  Émile Martin meurt à Paris où la famille s’est réfugiée. Ils ont quitté Lagny (Seine et Marne) bombardée par les Allemands.(voir texte ci-dessus).

Marie Martin, son épouse, va reprendre son métier de couturière et ses 2 filles vont devoir travailler dès que possible.

Louise sera Demoiselle de magasin et sa sœur Valentine (née en 1866) Fleuriste.

Être Demoiselle de magasin lui permettait d’être nourrie et  logée.

A quel âge a-t-elle commencé ? Sans doute vers 15- 16 ans, peut-être avant.

Elle fait la connaissance de Charles Dumonceaux car leurs mères respectives habitaient des immeubles voisins, rue Serpente à Paris (6e arrondissement)

Charles au prix de grands sacrifices consentis par sa mère, plumassière et veuve,  devient instituteur en 1880.

Il a quitté la classe ouvrière et il peut offrir à Louise la perspective d’une vie meilleure et plus douce et sans avoir besoin de travailler.

La sœur  de Louise, Valentine n’aura pas cette chance car elle meurt en 1885 à l’âge de 18 ans.

1888 : Louise à 25 ans, mère de 2 enfants

 

 

        Demoiselle de magasin : l’exemple du Bon Marché

Le Bon Marché passe d'un chiffre d’affaires de 500 000 francs, d'une surface de 300 m2 et de 12 employés en 1852 à 72 millions de francs, une surface de 50 000 m2 et 1788 employés en 1877.

Qu’elles soient employées comme vendeuses ou dans les bureaux, les femmes doivent avoir une attitude irréprochable, au magasin mais aussi à l’extérieur. Si elles n’ont pas de famille à Paris, elles sont logées en foyer au 16 rue de Babylone. Même si le lieu n’est pas un couvent, elles doivent rentrer avant 23 heures en semaine, avant minuit et demi les dimanches et jours de fête. Tout manquement doit être préalablement signalé et justifié. Les fautives ne risquent pas d’amende, mais peuvent être exclues de ce dispositif avantageux  et  totalement gratuit.

Dès leur arrivée au magasin vers 7h30, les femmes peuvent rejoindre leur salle à manger pour prendre un potage, du café au lait ou du chocolat.

Chaque employé est nourri gratuitement, et a droit à deux repas complets par jour : le déjeuner (plat de viande au choix, légumes et dessert) et le dîner (potage, plat de viande, légumes, salade et dessert). Les repas des employés sont servis en trois services, heure par heure, afin de rester au maximum à disposition de la clientèle.

À ce repas, équilibré et bien supérieur aux pratiques alimentaires de l’époque, chaque employé a droit à un demi-litre de vin ou une bouteille de bière. S’il y a des contraintes médicales, les aliments prescrits sont fournis gracieusement.

 Marguerite Boucicaut avait en tête qu’une bonne nutrition était gage de bien-être et de productivité.

Au magasin, les vendeuses sont en uniforme noir strict.

Elles sont licenciables et corvéables à merci mais peuvent bénéficier de la promotion interne (second, chef de comptoir puis gérant selon une progression non plus à l’ancienneté mais au mérite).

Elles ont droit à un jour de congé hebdomadaire.

 

Ce n’est qu’à partir de 1901, qu’elles auront droit de s’asseoir.

 

 

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