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La jeunesse d’Henriette

Henriette Rudler (1885 – 1973)

 

                  Henriette Rudler est ma grand-mère paternelle.

Elle est née à Paris le 31 janvier 1885 dans le 18e arrondissement au pied de la Butte Montmartre, rue Tardieu.

Après être revenue d’Alsace où elle avait été mise en nourrice chez ses grands-parents paternels,  elle a vécu dans le 11e arrondissement chez ses parents jusqu’à son mariage en 1907, soit boulevard de Charonne, soit avenue Philippe Auguste.

Seul son père travaillait comme comptable dans une entreprise de Ferblanterie.

         En 1952, ma grand-mère a écrit ses souvenirs d’enfance imprégnés d’amertume. Elle y évoque sa mise en nourrice, sa situation d’enfant et d’écolière et ses aspirations.

 

         « Je voudrais maintenant parler de ma jeunesse mais j’ai peur d’être trop sévère envers mes parents. Il y avait un fossé entre parents et enfants et ma mère se flattait auprès de mes beaux-parents de ne pas m’avoir gâtée, bien que fille unique.

La règle à l’époque, avant 1900, était d’obéir, de ne jamais discuter un ordre, de ne pas demander une faveur, une sortie, une toilette, tout ce qui pouvait causer une dépense supplémentaire.

Mon père qui a travaillé 35 ans dans la même usine, Boulevard de Charonne, avait un salaire modeste. Le 31 décembre, il touchait une enveloppe de gratification, à laquelle on ne touchait pas, la plaçant pour les vieux jours. Il faut dire qu’il n’y avait pas de retraite et chaque mois mon père faisait un versement à la Caisse des retraites pour la vieillesse et ma mère marquait ses dépenses journalières et mensuelles sur un livre spécial.

(Henriette a tenu  aussi un journal de ses dépenses jusqu’en 1968)

Un sou était un sou. Ma mère était un modèle d’économie, pas de dépense inutile et, je le savais, il ne fallait rien demander. Des camarades à l’école avaient des bonbons et parfois m’en donnaient.

Le jour de mon certificat d’études, il faisait une chaleur torride (en juillet), pour l’après-midi, il y avait couture et ma mère me donna 2 sous pour acheter des pastilles de menthe.

 

Quand j’entrais à Sophie Germain, j’avais 13 ans et demi. Une camarade faisait matin et soir la route à pied avec moi. Ses parents étaient concierges de l’école de garçons rue A. Dumas. Elle achetait une brioche, sans doute avait-elle faim, et avait eu plusieurs fois la gentillesse de m’en offrir une, mais un jour je la remerciai en refusant,  ne pouvant lui rendre sa gentillesse.

 

Un jour que j’avais mal aux dents et à une oreille, la répétitrice me dit : « on va vous reconduire chez vous ». Je dus avouer que je n’avais pas les 3 sous nécessaires pour un billet de métro. La femme de service prit 2 billets et ma mère lui donna 2 francs pour le retour.

A partir de ce jour-là, j’eus 1 franc dans un vieux porte-monnaie.

 

     En 1900, au mois de juillet, le métro fonctionna mais ma mère prétendait que cela me ferait du bien de marcher. Je faisais donc les 2 trajets à pied en portant un panier avec mon repas et ma sacoche de livres. J’arrivais le soir fatiguée et il y avait encore à travailler après le dîner : les devoirs et les leçons.

     Il est vrai que j’avais une bonne santé ! »

Henriette en 1898

Ses parents sont à gauche sur la photo.

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