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Robert Dumonceaux

 

            Je suis fille, petite-fille et arrière-petite-fille d’enseignants et j’ai moi-même été Professeur des écoles pendant 16 ans.

            Depuis 1958 (début de la Ve République), 38 ministres de l’Éducation Nationale se sont succédés avec une moyenne de 2 ans au ministère.

            L’année 2024 qui n’est pas encore terminée a déjà vu 4 ministres, un record.

            Quand j’étais enfant, mes parents, Professeurs de Lycée se plaignaient des réformes incessantes. J’ai été moi-même confrontée à ce problème.

            Une certitude, les enseignants du 1er degré ont été inspectés et le sont toujours. Ayant consulté les rapports d’inspection de mes grands-parents vers 1920, peu de changement par rapport aux miens (années 1995-2000).

 

            En 1923, Robert Dumonceaux, Inspecteur primaire de la circonscription de Melle (Deux-Sèvres) inspecta Henri Mangou, instituteur à La Couarde (Deux-Sèvres).

Robert et Henri seront mes futurs grands-parents (voir article précédent).

            En parallèle, le fils d’Henri Mangou relate dans ses souvenirs la visite de l’Inspecteur.

            J’ai donc imaginé un dialogue entre Robert et moi.

 

            Peux-tu me dire pourquoi et quand tu es arrivé à Melle

            J’ai commencé ma carrière d’Instituteur en 1904 après mon service militaire et 3 années passées à l’École Normale d’Auteuil.

            Mobilisé en 1914, je n’ai repris mon poste qu’en avril 1918. J’ai été démobilisé car réformé temporaire.

            Je décide de passer le Concours d’aptitude à l’Inspection des écoles primaires.

            Je suis reçu 14e sur 44 admis et suis nommé le 11 février 1922 à Melle (Deux-Sèvres)

            Qu’en a pensé ta femme ?

Cette nomination à Melle a été un bouleversement pour toute la famille. Henriette très attachée à la vie parisienne (elle y est née en 1885) a eu beaucoup de mal à se faire à la vie provinciale (2500 habitants à notre arrivée).

Mais d’un point de vue professionnel elle a pu être titularisée sur un poste à Melle.

Robert en 1924

            Comment travaillais-tu ?      

En tant qu’Inspecteur Primaire j’allais dans les écoles de ma circonscription.

Au début je me suis déplacé en moto puis j’ai acheté une voiture.

         C’est ainsi que je suis allé inspecter un couple d’instituteurs, Henri et Marie-Louise Mangou.

            Ah oui, je connais cette visite à La Couarde car mon oncle Jean Marie l’a décrite dans ses souvenirs :

« Un certain jour, grand émoi dans la maison : visite de l’Inspecteur primaire. Était-il annoncé ? Effectuait-il une intervention à l’improviste ? En tout cas j’étais seul dans la cour de l’école lorsque je le vis sortir de la classe de mon père à l’heure de la récréation. Notre mère avait déjà regagné la maison et m’appela aussitôt. Elle me fit comprendre que la bonne me ferait manger avant tout le monde et que j’irai jouer ensuite dans la cour durant le repas où l’inspecteur était invité.

En effet un peu après midi, cet inspecteur précède mon père à l’entrée. Il était grand, brun avec des cheveux qui ondulaient et une moustache en pointe. Il me tapota la joue au passage et je suis sorti ainsi qu’il était convenu…. »

 

Je me souviens parfaitement de la première fois où je les ai rencontrés en juin 1923.

C’était à l’école de La Couarde, commune de moins de 500 habitants, située en pays protestant et à proximité de Saint Maixent.

L’école de La Couarde en 2010

En arrivant devant l’école j’ai été accueilli par le fils Jean Marie.

J’ai appris aussi que le couple a une fille un peu plus âgée, Jacqueline (la mère de l’auteure de ces lignes).

Jacqueline et Jean Marie sont les 2 enfants du milieu (1923)

Henri Mangou et sa classe vers 1922 – 1923

Debout et à droite, Jean Marie son fils

 

Peux-tu me décrire ton inspection ?

Oui, aucun problème

J’ai donc inspecté  Monsieur Mangou qui enseigne à l’école de garçons dans une classe CP-CE de 23 élèves.

 Conclusion de mon inspection :

         « J’ai vu Monsieur Mangou à l’œuvre dans le cours préparatoire et élémentaire. Il témoigne de qualités de patience et de douceur et je note un effort heureux pour éveiller les jeunes intelligences.

La classe est en bonne voie : il suffira de stimuler en français quelques attardés du cours élémentaire »

            Au cours de ta carrière à Melle, es-tu venu revoir Monsieur Mangou et Madame Mangou ?

Oui car à partir de 1924, ce couple d’instituteurs (Les Mangou)  s’est rapproché de Melle et ils ont eu un poste double à Saint Romans lès Melle. Une promotion pour eux puisque le village comptait plus de 625 habitants.

Ma dernière inspection date de février 1929.

Les Mangou sont désormais à Melle : Monsieur Mangou est Directeur de l’école et il enseigne en CM et Cours Supérieur. Voici la conclusion de mon rapport d’inspection :

« Monsieur Mangou dirige son école avec tact et autorité. Il s’occupe en conscience des œuvres postscolaires (pupilles, bibliothèque pédagogique, orphelinat) et c’est un instituteur méthodique et réfléchi qui obtient des résultats très satisfaisants »

De son côté Madame Mangou enseigne en CM- CE dans l’école de son mari.

« Impression très satisfaisante. Madame Mangou est une institutrice expérimentée qui enseigne méthodiquement et donne un enseignement tout à la fois simple et solide. Les enfants ont d’heureuses habitudes de travail et il règne dans la classe un bon esprit »

            Et ensuite,

Ce sera la dernière fois car je suis nommé à Chartres ainsi que ma femme qui deviendra Directrice d’École maternelle.

En août 1929, Henri Mangou meurt (il était cardiaque depuis longtemps). Sa femme doit quitter son poste et sera nommée à Aiffres.

Et je vais rester à Chartres  jusqu’en 1938. Puis ce sera le retour à Paris. Mais je suis très malade et meurs en juillet 1939.

            Pourquoi Henriette, ton épouse est-elle allée à Niort en 1939 ?

 Henriette et Marie-Louise sont restées en contact toutes ces années et ont tissé des liens d’amitié.

En 1939, les fonctionnaires doivent quitter Paris et Henriette va se « réfugier » à Niort chez Mme Mangou.

            En 1940, Henriette et notre fils Jean reviennent à Paris.

            Sais-tu que toi Robert Dumonceaux et Henri Mangou serez mes 2 grands-pères.

Je ne vous ai pas connus car décédés en 1929 (Henri) et 1939 (toi) et moi je suis née en 1949.

            Bien sûr que je le sais grâce à ce que tu écris.

            C’est ainsi que se termine notre rencontre.

 

 

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A
Merci, Odile, pour ce RDV. Une source, que ces rapports d'inspection, que je n'avais pas imaginée. Merci encore
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C
C'est super d'avoir ce genre de détails !
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E
Un beau rendez-vous
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